Quelques éléments de vie
A la fin de sa vie avec sa décoration dans l’ordre de Saint-Louis
Louis-Victor Robatel naît le 14 septembre 1788 à Samoëns (duché de Savoie). Il s’éteint le 13 avril 1877 au Bouveret dans le canton du Valais en Suisse.
Son enfance : Sa petite enfance se déroule à Saint-Maurice dans le Valais. A l’âge de huit ans, avec sa mère, un de ses frères et sa sœur, il rejoint son père aux îles Baléares. Celui-ci est médecin major dans un régiment de mercenaires suisses au service de la royauté espagnole.
Au service de l’Espagne : Aux côtés de son père, à Palma de Majorque, Louis entre dans l’armée. En 1804, à seize ans, il a déjà le grade de sous-lieutenant. Sa carrière militaire le conduit à Barcelone, Lérida, Madrid. Au sein de l’armée commandée par le général français Dupont, son régiment subit la défaite de Bailen en1808. Les vaincus, prisonniers, sont détenus à Chipiona.
Ensuite libérés, les mercenaires suisses sont réorganisés en un bataillon qui participe à nouveau à la terrible guerre d’Espagne mais, là, contre les Français ! A Ocana, le 19 décembre 1809, Louis, depuis peu lieutenant, est à nouveau capturé, cette fois par les troupes du maréchal Soult. Incarcéré à Madrid, il est ensuite transféré à pied vers la France Le périple se termine à Mâcon où, soumis à un régime de détention très libéral, il retrouve chez l’abbé Farraud, ami de la famille, son frère Maurice et sa sœur Joséphine.
Au service de la France : Fin 1810, le Valais, annexé à l’Empire napoléonien, devient le département du Simplon. Devenu français plutôt malgré lui, Louis retrouve Martigny. Recruté en 1813, il reprend du service dans le 11e régiment d’infanterie légère. Affecté en Prusse, il fait partie des 10 000 hommes de la garnison de Magdebourg, sur l’Elbe. Dépassé par les armées coalisées contre Napoléon, son régiment est encore à Magdebourg en 1814 quand les cosaques arrivent à Paris. Napoléon vaincu est envoyé à l’île d’Elbe. Louis, démobilisé à Rennes, rentre dans son pays redevenu indépendant.
Sous la Restauration (1815-1830), à nouveau mercenaire, il est incorporé dans le 2e régiment suisse au service des souverains français. Le 29 octobre 1823 il accède au grade de capitaine. En 1824, il fait partie du corps expéditionnaire qui va rétablir Ferdinand VII sur son trône. Le 23 mai 1825, il est décoré de la croix de Saint-Louis : il l’a préférée à la Légion d’honneur. De retour en France, les changements de garnisons sont nombreux : Chalon-sur-Saône, Dijon, Nancy, Metz, Givet, Auxerre, Lyon, Brest, Bayonne, La Rochelle, Vannes,… En 1830, pour avoir refusé d’abandonner la cocarde blanche au profit de la cocarde tricolore, par punition, il est muté à Belle-Isle. Après une dernière garnison à Besançon, il est licencié : il a 42 ans.
Liens avec Fleurey-sur-Ouche
En 1819, le régiment suisse est caserné à Dijon. Louis Robatel est amené à fréquenter la famille Lechevallier. Il rencontre alors leur fille Pauline et noue une relation sentimentale avec cette jeune demoiselle. La suite, on la devine : le 6 juin 1821, c’est le mariage entre Pauline, 17 ans, et Louis, 32 ans, célébré par l’abbé Farraud en l’église Notre-Dame de Dijon.
En 1830, c’est la retraite avec seulement la demi-solde. Heureusement les beaux-parents sont là. Le couple et les enfants rejoignent la maison de campagne de Saint-Apollinaire, y restent 18 mois puis partent à Fleurey. “Nous résolûmes d’aller prendre notre logement (chez le docteur Pérille, au château dit du Prieuré) à Fleurey-sur-Ouche, à trois lieues à l’Ouest de Dijon, où nous avions l’agrément de revenir de temps en temps, soit à pied le long du canal de Bourgogne(5), dont les bords ombragés de beaux peupliers d’Italie forment une charmante promenade, soit en voiture sur la grande route de Paris suivant la même direction.”
Magnanier à Fleurey et à Velars : Le décès de la mère de Pauline en 1833 apporte en héritage de nouvelles ressources. La maison de maître (qu’on appelle aujourd’hui le Castel), avec grange et écuries, sise à Fleurey-sur-Ouche, à la Vellotte, est à vendre. Tout en ignorant qu’elle est exposée aux inondations (en 25 ans, il va devoir en subir trois avec de gros dégâts !), Robatel achète la propriété pour 9 000 francs. Il fait dans le même temps l’acquisition de douze grands journaux de terres labourables : un journal et demi à Fleurey et dix et demi à Velars “où voulant établir une magnanerie, local pour élever des vers à soie dont l’éducation (sic) était estimée d’un grand produit, je me suis décidé à faire une plantation de plusieurs milliers de mûriers dont la feuille devait faire la principale nourriture de ces précieuses chenilles”. Louis et Pauline vont bien s’intégrer à Fleurey, leur nouveau cadre de vie. Les enfants, Ernest et Théodore, font leurs études au petit séminaire de Plombières-les-Dijon. Des amitiés sont nouées avec l’abbé Marillier et la famille de Girval.
Alors qu’il a connu une certaine réussite non loin de là, à Verrey-sous-Salmaise, mené de 1835 à 1845, l’élevage des vers à soie va se révéler délicat. Fréquemment les chenilles meurent en grand nombre avant d’arriver au filage des cocons. Les revenus escomptés sont inexistants. Bientôt, la sériciculture est abandonnée. Les propriétés de Fleurey et Velars sont mises en location.
C’est le retour en Valais, le temps de participer, en 1847, à la tête d’un bataillon, au mouvement révolutionnaire suisse (Sonderbund). Ensuite privé d’emploi, Louis revient en Côte-d’Or. La maison de Fleurey est louée depuis novembre 1843 à Louis Adelon, “un homme très disposé à embrasser le parti turbulent de l’anarchie “. En attendant, il faut rester à Dijon, rue Charrue, chez un neveu, jusqu’en mai 1850, date à laquelle l’élevage des vers à soie est repris dans la petite maison de Velars en lien avec une société de Dijon initiée par le duc d’Orléans. Reprise éphémère : très rapidement ce sera la faillite de l’entreprise.
Pour neuf ans, à nouveau au bord de l’Ouche : A la fin de 1850, le couple Robatel avec trois petits neveux retrouve le Castel. Neuf années s’écoulent dans une relative sérénité. Catholique très pratiquant, l’officier en retraite voue une dévotion particulière à la Vierge de Velars et fait partie du conseil de la confrérie de Notre-Dame d’Etang. L’Ouche déborde une fois de plus, inondant le rez-de-chaussée de la maison avec comme conséquences la réfection nécessaire et coûteuse des soubassements et des plinthes.
Puis les ressources financières deviennent insuffisantes. Pour des raisons économiques, il est décidé de rejoindre le berceau de la famille Robatel, près de Martigny. La maison et les champs de Fleurey sont vendus.
Pélerinage dans la vallée de l’Ouche et adieux définitifs à la Bourgogne : Pauline souffre de fièvres intermittentes, sans doute du paludisme. Les Robatel se laissent aller à l’espoir que l’air natal de la Bourgogne aurait l’efficacité si désirée de l’en débarrasser. Le 21 juin 1865, ils retrouvent Dijon : ils sont hébergés par un de leurs neveux. Ils profitent de leur séjour pour aller visiter leurs anciennes connaissances de Fleurey et pour participer, le 2 juillet, jour de la Visitation, au pèlerinage de Notre-Dame d’Etang. C’est à ce moment que les propriétés de Velars sont à leur tour vendues.
Cette dernière vente met fin aux liens matériels de Louis Robatel avec la Bourgogne. Il séjourne définitivement dans le Valais de son enfance. De sa main octogénaire, il y écrit ses mémoires. Il s’éteint le 13 avril 1877 au Bouveret.